Monet et les nymphéas

Musée de l'Orangerie
Du 13 avril au 20 août 2018

Claude Monet -
Série Nymphéas (1899 – 1924) //

 

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Il n’y a qu’un pas entre Impressionnisme et Abstraction

Cette série florale s’est faite en trois temps, le premier volet étant nommé Bassins aux nymphéas (1899-1900), le second Les Nymphéas, séries de paysages d'eau (1903-1908) et le dernier Le Pont japonais (1918-1924). En somme, trois périodes plus ou moins courtes, espacées sur les trente dernières années de la vie de Monet.

Plus le temps passe, plus ces périodes s’allongent. Claude Monet, atteint de cataracte, voit sa vue s’affaiblir avec le temps. Drame évident pour l’homme dont l’art impressionniste est fondé sur l'utilisation de la couleur, qui doit à elle seule "dessiner" le motif sans recours à la ligne… Ses peintures, en particulier ses Nymphéas deviennent au fur et à mesure de plus en plus “imprécis”, flous, abstraits de fait. La nuit s’abat progressivement sur l’œuvre de Monet, de 1910 à 1923, ses œuvres s’obscurcissent, les contours s’estompent et certaines couleurs disparaissent. Monet disait : “Ma mauvaise vue signifie que je vois tout comme au travers d’un brouillard”.

Accident heureux ? Certainement pas. Cette maladie sonne le glas de l’artiste, qui, le cristallin s’opacifiant, usera de traitements en tout genre pour dilater au maximum sa pupille, trompant ainsi de son mieux ce mal qui le ronge. Monet, le “peintre en série” donne, sans le vouloir, un coup de fouet spectaculaire à son œuvre. Sa perception des formes et des couleurs étant évidemment très altérée. L’inspiration sans limite qu’il tirera de son jardin de Giverny, connaîtra, avec cette maladie, une transformation tristement sublime.

Ce détail de 1897-1899 présente très clairement de belles fleurs et feuilles de nymphéas, on y discerne même les reflets subtils de l’eau du lac.

Ici, la comparaison est bien plus frappante. Quand les contours et matières du pont sont évidents (1), ce même pont, 25 ans plus tard (2) n’en est un que parce que l’on sait qu’il en est un. L’objet est de fait suggéré tout comme dans l’art dit abstrait. Le pointillisme voluptueux de Monet devient plus grossier et l’utilisation des couleurs tend d’autant plus vers le monochrome. Du cliché de jardin pittoresque et paradisiaque à l’amalgame incertain de matière, la transformation du style est troublante.

En cuisine, on dit souvent que les erreurs peuvent créer de grandes recettes. Et bien il est, d’une certaine manière, de même pour l’œuvre de Monet, qui, à cause ou grâce à la maladie, a connu un virage qui inspire encore aujourd’hui les plus grands peintres contemporains.

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Visible au Musée de l'Orangerie 
Du  13 avril au 20 août 2018 


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